HIJABILADIES

Est-il permis de souhaiter à ses amis non-musulmans de passer une joyeuse fête ?

Voici deux avis différents...

  • Après avoir cité des avis disant qu'il était autorisé à un musulman de féliciter ceux qui ne sont pas musulmans à propos des choses de la vie comme une naissance, un mariage, etc., et de leur souhaiter bonne santé, prospérité, etc., Ibn ul-Qayyim écrit en susbtance : "Ce qui précède concerne le fait de les féliciter à propos de choses communes aux humains. En revanche, les féliciter à propos des symboles de leur religion est interdit à l'unanimité. Par exemple les féliciter pour leurs fêtes ou leur jeûne, et leur dire alors : "Joyeuse fête !" etc. Si celui qui dit ceci ne tombe pas lui-même dans le kufr, il commet au moins un interdit. C'est comme si on félicitait ce non musulman pour sa prosternation devant la croix" (Ahkâm ahl-idh-dhimma, pp. 205-206). Cet avis de Ibn ul-Qayyim se fonde sur le fait que le musulman considère que la liberté de conscience et de religion est un fait reconnu par l'islam lui-même, qui fait qu'il doit respecter les autres religions que l'islam, mais qu'en son âme et conscience, il ne peut féliciter le fait qu'un homme se prosterne devant autre que Dieu. Il doit respecter cet homme en tant qu'homme. Il doit respecter le fait que cet homme ait choisi une autre religion que l'islam. Mais il ne peut le féliciter pour tout ce qu'il fait. Il y a ainsi une différence entre le fait de respecter les croyances et les pratiques religieuses d'autrui et le fait de féliciter autrui pour ces croyances et pratiques.
  • Al-Qardhâwî, pour sa part, a un avis nuancé par rapport à celui de Ibn ul-Qayyim. Il écrit en substance : "Je sais que certains savants, comme Ibn Taymiyya dans son livre Iqtidhâ us-sirât al-mustaqîmi mukhâlafata as'hâb il-jahîm, ont été sévères à propos des fêtes des non-musulmans. Je suis moi aussi d'avis qu'un musulman ne doit pas célébrer une fête religieuse non-musulmane. Certains musulmans se sont mis à fêter Noël comme ils fêtent la Eid ul-fitr et la Eid ul-adh'hâ. (…) Or nous musulmans célébrons nos fêtes religieuses et eux célèbrent les leurs" (Fatâwâ mu'âssira tome 3 pp. 672-673). En effet, le Prophète a dit des différentes religions qu'elles avaient chacune "leurs jours de fête" et que les musulmans avaient les leurs (rapporté par Al-Bukhârî, n° 909, Muslim, n° 892, etc.). Les habitants de Yathrib (Médine) avaient, lorsqu'ils étaient encore idolâtres avant la venue de l'islam, deux jours de fête, et les voyant continuer à les célébrer après leur conversion à l'islam, le Prophète leur dit que Dieu leur avait donné en place et lieu les fêtes de la Eid ul-fitr et de la Eid ul-adh'hâ (rapporté par Abû Dâoûd, n° 1134, an-Nassaï, n° 1556). Les jours qui suivent la Eid ul-adh'hâ sont aussi des jours de fête (peut-être d'importance secondaire car dépendant de la Eid ul-adh'hâ), comme cela ressort du Hadîth rapporté par Muslim (n° 1141) et d'autres. Un autre Hadîth montre quant à lui que aussi bien le jour qui précède la Eid ul-adh'hâ, que le jour de la Eid ul-adh'hâ et les jours qui suivent la Eid ul-adh'hâ sont des jours de fête pour les musulmans (rapporté par at-Tirmidhî, n° 773, Abû Dâoûd, n° 2419, etc.)
    Al-Qardhâwî poursuit : "Mais je ne vois pas de mal à ce que un musulman souhaite une bonne fête à un non musulman lorsque ces deux personnes sont parentes, voisines ou collègues : ce sont des cas où les relations humaines nécessitent cela." Et il souligne : "Leur souhaiter bonne fête ne revient pas à reconnaître vrai ce qu'ils font, ni à être d'accord avec leurs croyances ou leurs pratiques religieuses. Il ne s'agit que de paroles de courtoisie, relevant de bonnes relations humaines" (Fatâwâ mu'âssira tome 3 pp. 672-673). Ce savant garde lui aussi comme principe qu'il y a une différence entre le fait de respecter les croyances et les pratiques religieuses d'autrui (ce qui est nécessaire en islam) et le fait de féliciter autrui pour ces croyances et pratiques (ce que le musulman doit impérativement éviter). Il est cependant d'avis que ce principe n'est pas présent dans le cas qui nous intéresse ici. Et plutôt qu'une simple divergence de vues par rapport à l'avis de Ibn ul-Qayyim en la matière, al-Qardhâwî opte davantage pour le fait qu'il s'agirait d'une divergence d'avis liée à un changement de contexte
    . En effet, al-Qardhâwî explique son avis en disant que sur plusieurs points, la situation a changé par rapport à l'époque de Ibn Taymiyya et Ibn ul-Qayyim. Il cite notamment ce point-ci : aujourd'hui, pour une grande partie des occidentaux, Noël n'est plus vécu comme un phénomène religieux mais comme un phénomène traditionnel à l'occasion duquel ils se réunissent, se font des cadeaux et prennent ensemble un repas (fin de citation). Chacun connaît ainsi plein de gens qui sont agnostiques, voire même athées, et qui pourtant fêtent Noël assidûment. La célébration de Noël consiste pour eux à se réunir en famille, à prendre un repas et à se faire des cadeaux.
    Bref, selon al-Qardhâwî, d'une part, en regard pour l'origine religieuse de Noël et pour le fait que cette connotation religieuse n'a pas complètement disparu des esprits, un musulman ne doit pas célébrer ce genre de festivités religieuses. D'autre part, cependant, en regard pour le fait que tout le monde ne fête pas Noël dans ce sens, il est permis en cas de nécessité de souhaiter à ses voisins, ses collègues et ses amis non musulmans de "bonnes fêtes de fin d'année". Cette permission, souligne al-Qardhâwî, se révèle particulièrement utile en tant que réciproque vis-à-vis des non musulmans qui nous souhaitent une "bonne fête" lors des Eids.
    Al-Qardhâwî précise que tout ceci concerne les fêtes à connotation religieuse. Par contre, et ce toujours selon lui, il est permis de participer aux célébrations liées à l'indépendance du pays où l'on vit, à sa libération de l'occupation, du moment que l'on reste lors de ces célébrations dans le cadre de ce qui éthiquement permis en islam (cf. Fatâwâ mu'âssira tome 3 pp. 672-673).

    Notez que je me suis contenté de citer les deux avis ainsi que leurs argumentations.

    Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).


  • 22/12/2008
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